mercredi 2 novembre 2016

Contribution à la réflexion et au débat sur le projet de délibération sur la compétence culturelle qui sera soumis au vote du conseil métropolitain

A Mesdames, Messieurs le Maires des communes de la métropole grenobloise,
A Mesdames les Directrices et Messieurs les Directeurs des affaires culturelles,
 Contribution à la réflexion et au débat sur le projet de délibération sur la compétence culturelle qui sera soumis au vote du conseil métropolitain le 3 novembre
Grenoble, le 28 octobre 2016 
 Mesdames, Messieurs les Maires,

Ayant participé de façons diverses, comme annoncé dans notre précédente missive en avril dernier, à la phase de concertation préalable à l’établissement du texte qui nous est soumis par la présidence, nous vous adressons les réflexions et propositions qu’il nous inspire.
    De ce projet de délibération nous disons qu’il est décevant en regard des échanges qui ont eu lieu dans la phase de concertation. Inventaire à la Prévert, fourre-tout, il est une juxtaposition de réflexions parfois intéressantes mais menées de manière cloisonnée. Nous sommes bien conscients que la compétence culturelle ne peut s’opérer que de façon progressive ; mais cela requiert justement de dégager au départ une vision politique clairement identifiée et structurante pour des perspectives culturelles métropolitaines ambitieuses et novatrices.
    Ce que le texte ne fait nullement puisqu’il propose dans l’immédiat, sans aucune autre réflexion d’ensemble, comme premier pas, le transfert de la MC2 et de l’Hexagone. Quelle en est la logique ? S'agit-il d'avoir à proposer quelque chose à minima avec une loi MAPTAM qui se réfère exclusivement aux équipements, alors même que cette approche est dénoncée depuis le début par de nombreux élus ? L'incompréhension autour de ces transferts vient bien de l'absence totale de mise en perspective, laquelle impliquerait à tout le moins une réflexion sur les autres lieux ressources qui œuvrent sur les champs de l'action culturelle dans la métropole. « Tout ça pour ça » aurait-on envie de dire…
C’est dès maintenant que doit émerger un schéma directeur des actions culturelles autour d'axes politiques lisibles structurant la construction métropolitaine à venir de cette compétence. 
 Pour contribuer à la réflexion nous proposons quatre axes structurants:
1- Le soutien à la création, cadre d'une nouvelle façon de se rencontrer, de participer, de se former, d'apprendre
Dans un contexte financier difficile, l'insuffisant pouvoir d'achat des scènes pénalise un peu la création et les responsables de programmation préfèrent légitimement en conséquence se tourner vers la diffusion de propositions reconnues qui consolident les équilibres financiers fragiles de leurs équipements. Notre territoire métropolitain a toujours été le siège d'un bouillonnement culturel important reliant animation et création à travers une affirmation esthétique exigeante et populaire. Peuple et Culture lié à l'histoire des Maquis du Vercors, première expérience de décentralisation culturelle avec Jean Dasté, militants de l'Education populaire et amis des arts, l'ACTA (l'Action Culturelle par le théâtre et les Arts) puis la Comédie des Alpes sont des ancrages majeurs de l'histoire culturelle de notre territoire métropolitain.
Que serait la dynamique culturelle métropolitaine, que seraient nos équipements, nos scènes et nos événements sans le foisonnement de propositions, sans l'expérimentation, la recherche de nouveaux langages et de nouvelles formes esthétiques?
La place de la création dans la métropole peut être réfléchie selon des modalités ou relais divers : depuis les équipements existants, à partir d'un « lieu »de fabrique dédié (pas forcément matériel), par des résidences d'artistes, dans une contractualisation entre les équipements et les communes (pas seulement celles où ils sont implantés), avec d'autres réseaux impliquant les festivals et les scènes nationales, européennes. Il est essentiel que le soutien à la création soit un axe organisant notre dynamique culturelle à l'échelle de la métro.
Ce soutien métropolitain à la création devra nécessairement et parallèlement s’accompagner d’aides à des actions d'éducation, de pratiques et de médiations susceptibles de relier les publics en particulier les plus éloignés des champs de l'action artistique et culturelle.
Ce double soutien doit aussi viser à remédier autant que possible aux inégalités qui existent actuellement entre les diverses communes. Il suppose une étroite concertation entre les communes et la Métro afin que celle-ci encourage les coopérations et les mutualisations mutuellement bénéfiques.
2 - Histoire ouvrière, multiculturalisme, sciences et techniques, une mémoire qui mise sur le lien, la rencontre et par là-même à un mutuel enrichissement 
Notre histoire métropolitaine est liée à la venue de nombreuses populations ouvrières aux origines diverses construisant tout au long du 20ème siècle notre identité multiculturelle. La recherche d'un travail, d'une vie meilleure en sont le cadre avec les débuts de l'industrialisation, les découvertes scientifiques et techniques que notre situation géographique, avec l'énergie hydraulique, va contribuer à développer massivement (chimie, papeterie, tissage, tannerie, viscose...)
L'ancrage de plusieurs cultures a été et doit rester une richesse. Notre histoire métropolitaine est structurée par cette citoyenneté ouvrière, qui interroge notre identité présente et future, notre imaginaire collectif (transmission, identification, sentiment d'appartenance...), histoire qui nourrit notre capacité à construire des perspectives communes.
L'histoire contemporaine récente, celle des technologies nouvelles dans notre territoire, fait bien sûr partie de cet axe muséal. Pas question d’opposer les unes aux autres !
Tel est selon nous, dans toutes ses riches dimensions, l’axe muséal qui doit être porté et soutenu par la métropole.
 3 - Lecture publique, la force des réseaux 
 De nombreuses bibliothèques se sont regroupées en réseau. Leurs histoires récentes ou plus anciennes sont différentes. Elles leur permettent de se construire une culture commune pour mieux développer la lecture publique et le service aux populations, de renforcer l'harmonisation des pratiques, de travailler sur une politique documentaire concertée, de renforcer la culture professionnelle des personnels.
L'évolution numérique amène de nouveaux défis aux professionnels, confrontés toujours plus à la nécessaire maîtrise des systèmes d'information, laquelle questionne l'indépendance, le pluralisme, la liberté au cœur de leur mission d'intérêt public, notamment de consolider l’esprit critique et le lien social.
Une coordination des réseaux existants constituerait une force supplémentaire au service d'une dynamique de réflexion qui s'attache à mettre en œuvre une politique de lecture publique partagée et forte à l'échelle métropolitaine.
4 - S’agissant de l’enseignement musical
Il s’agit pour la Métropole de se doter d’une politique d’enseignement musical en complémentarité avec la compétence du Département dont celui-ci ne souhaite pas se défaire. Il est souhaitable de concevoir une articulation entre les différents équipements d’enseignement artistique de l’agglo dont certains fonctionnent déjà en réseau en partie grâce à l’action de Conseil départemental et à son schéma des enseignements artistiques, schéma fonctionnel depuis longtemps. Il serait avantageux de faciliter un travail en réseau entre écoles, conservatoires, notamment pour les enseignements rares dont les enseignants interviennent en plusieurs lieux, qui n’auraient plus qu’un seul employeur.
Plus généralement, les dispositifs et actions d’éducation artistique et culturelle devront bien sûr être valorisés.
Voilà donc définis quelques axes structurants qui donneraient dès maintenant à l’engagement métropolitain en matière de culture une base riche de sens et dynamisante. Et qui permettrait ultérieurement d’en construire le développement au plus près des besoins des populations des communes dans un esprit de coopération et d’enrichissement mutuel. 
Engagement qui pourrait être affirmé dans une « Charte de coopération » en guise de préambule, garante d’une gouvernance partagée avec les communes. 

De nombreuses contributions entendues au long des réunions de concertations de ce printemps font référence aux axes développés ci-dessus, sans déboucher sur une vision métropolitaine rassembleuse et lisible. Ils peuvent constituer le socle d’une perspective et d’une décision culturelle fondatrice dont l’écho, nous n’en doutons pas, contribuerait singulièrement, au propre comme au figuré, à « l’image de la Métropole ». 
Autre façon, peut-être, d’en concevoir « l’attractivité ».
En vous remerciant par avance de vos retours et avis nous vous adressons nos cordiales salutations.
Les initiateurs de l’appel culture 38